Pour une Fête de la Musique en distanciel !

Chronique pour une Fête de la Musique très particulière

C'est un musicien américain Joël Cohen (né en 1942), luthiste et chef de chœur, élève de la célèbre pédagogue française Nadia Boulanger,  spécialiste de musique ancienne (The Boston Camerata), qui est à l'origine de la Fête de la Musique.

En 1976, Joël Cohen, marié à la soprano française Anne Azéma travaillait alors comme producteur d'émissions musicales pour France Musique.

Il proposait pour cette chaîne des « Saturnales de la Musique » pour les solstices du 21 juin et 21 décembre et souhaitait que les groupes de musiques jouent le 21 juin au soir, jour de l’é boréal.

Son projet a été réalisé pour la première fois le 21 juin 1976 dans l'Ouest parisien et à Toulouse. 

 

Le 10 juin 1981, André Henry, nouveau ministre du Temps libre, organise la « Fête de la Musique et de la Jeunesse » pour célébrer l'arrivée de François Mitterrand au pouvoir et le discours du 10 juin 1936 de Léo Lagrange sur les loisirs.

Ce concert gratuit réunissant environ 100 000 personnes Place de la République avec Jacques Higelin et le groupe Téléphone inspire Jack Lang pour créer une fête musicale populaire, la « Fête de la musique ».

Jack Lang, alors ministre de la culture, et Maurice Fleuret, directeur de la musique et de la danse du ministère, également influencés par Cohen, donnent ainsi l'impulsion décisive à l'événement et la première Fête est célébrée au plan national le 21 juin 1982.

 Dans un entretien récent pour la radio suisse-romande (21 juin 2015) Jack Lang a remercié Joël Cohen pour son idée.

 

Telles sont sur les origines de la Fête de la Musique aujourd'hui célébrée dans plus de 120 pays dans le monde, beau succès pour une idée toute simple éclose au bon moment...!

 

Fête de la Musique, musique de fête, la musique est fête.

 

Art collectif par excellence, la musique est amitié comme Schubert (1797-1828) l'a vécu et exprimé à travers son œuvre, ainsi dans le lied An die Musik (1817) sur un poème de son ami Franz von Schober (1796-1882) 

ici dans une transcription pour chœur  et orchestre de Luciano Berio (1925-2003), interprétée à distance le 13 avril dernier par le Chœur et l'Orchestre de Paris confinés.

 

A l'occasion de cette Fête de la Musique 2020 si particulière, voici un survol partiel - et partial, de l'histoire de la musique, de la Mésopotamie de Gilgamesh au groupe de K-Pop coréen BTS, survol illustré de nombreux exemples grâce aux liens vidéos...  

Cela a commencé il y a bien longtemps, par exemple à Babylone, au 18ème siècle avant notre ère, avec l'épopée de Gilgamesh, roi légendaire de la cité d'Uruk au 3ème millénaire av.JC, dont le musicien canadien Peter Pringle a restitué l'atmosphère dans l'extrait ci-dessous chanté en sumérien avec accompagnement de 'gishgudi' au long manche 

 

Suivi d'une improvisation sur une reconstitution de lyre chaldéenne en argent 

Quelques siècles plus tard on chante l'amour dans l'Egypte du Nouvel Empire (vers 1500 av.JC), toujours avec Peter Pringle

 

 

Encore quelques siècles et nous voici en Israël au temps du roi David et de sa lyre au 10ème siècle avant notre ère. 

 

 

Puis il y a la musique de la Grèce antique 

Hymne de mariage de la poétesse Sappho (6ème siècle avant notre ère). 

Hymne à la déesse Nemesis fille de Nyx (la Nuit)


Nous voici maintenant à Rome où la musique est moins raffinée qu'à Athènes, plutôt destinée aux armées, aux triomphes et aux jeux du cirque.

Cela pouvait ressembler à cette musique composée par Axel North pour la scène du film Cleopatra de Mankiewicz (1963) où Cléopâtre (Elizabeth Taylor) fait une entrée solennelle et remarquée à Rome avec son fils Césarion pour se soumettre à son amant et vainqueur César (Rex Harrison).   

 

 

Franchissons encore quelques siècles, un millénaire même, pour nous retrouver à Paris avec le poète et musicien français Adam de Saint-Victor, chantre de Notre-Dame (mort en 1146). 

O Maria stella maris (Marie, étoile de la mer)

 

Puis c'est la célèbre Ecole de Notre-Dame (Ars Antiqua) avec Pérotin le Grand (1160-1230), hymne Beata viscera Mariae virginis 

 

Voici alors l'Ars Nova avec Philippe de Vitry (1291-1361) évêque de Meaux, ami de Pétrarque (1304-1374), motet In Arboris  

 

La musique 'sérieuse' jusqu'ici essentiellement religieuse s'affranchit petit à petit de la tutelle de l'Eglise, ici avec Guillaume Dufay (1397-1474), chanson J'ai mis mon coeur 

 

 

Et là avec Josquin des Prés (1450-1521) et son grillon, chanson El Grillo par les Voices of Music de San Francisco, Californie 

 

 

Encore quelques dizaines d'années et nous sommes à Londres à l'époque du Roi Henri VIII (Tudor friand de mariage) avec Thomas Tallis (1505-1585)  hymne If you love me par les King's Singers version confinée Covid-19 

 

 

Passons à Dresde avec Michael Schultze (1571-1621) plus connu sous son nom latinisé Praetorius et le Ballet des coqs (Danses de Terpsichore)

 

 

Un siècle plus tard nous arrivons en pleine période baroque avec Jean-Sébastien Bach (1685-1750) dont voici l'Allegro moderato du 1er concerto pour violon en La mineur BWV 1041 interprété par le jeune prodige suédois Daniel Lozakovich (né le 1er avril 2001)  

 

 

Franchissons allègrement encore un siècle, passons Mozart et arrêtons-nous par exemple en 1820 avec Beethoven (1770-1827), 30ème sonate pour piano en Mi majeur op.109, 1er mouvement par Daniel Barenboim 

  

Et puisque nous enjambons les années, passons carrément  le 19ème siècle romantique et rendons-nous à l'Aeolian Hall de New-York le mardi 12 février 1924  pour la création de la Rhapsody in Blue de George Gershwin avec le compositeur au piano.

Voici la virtuose chinoise à la forte personnalité Yuja Wang (née en 1987), au Festival de Salzbourg le vendredi 12 août 2016 

 

 

Qui dit Gershwin dit jazz... Que se passait-il en 1924 dans le monde du jazz? Jimmy Blithe (1901-1931) enregistrait des rouleaux de musique dont le célèbre Chicago Stomp ou ce vibrant "Yes, we have no Bananas" blues 

 

 

Et puis arrivèrent les 4 garçons dans le vent et la Beatlemania, ici en 1968 dans Hey Jude  

 

Et 50 ans plus tard le samedi 8 juin 2019 c'était une Fête de la Musique pour les fans du groupe de K-Pop BTS qui enflammait le stade de France 

            

 

Mais la Fête de la Musique n'a attendu ni Joël Cohen, ni Jack Lang !

Car dans tous les bourgs et villages de France il y a toujours eu et il y a encore chaque année la fête au village.
 

Avec des ensembles locaux improvisés ou des professionnels de passage on chante, on danse, on s'amuse, comme ici en 1988 dans ce tube des Musclés La fête au village 

 

Et il y aura toujours des valses, des tangos, des pasodobles, l'accordéon d'Yvette Horner et le piano à bretelles de Stéphane Courtot-Renoux...

Avec Jean Sablon dans les années 1930 

 

Ou sans paroles avec l'accordéon d'André Constantino 

 

 

Le célèbre pasodoble el gato montès, version orchestrale 

 

La polka Perles de cristal de Georges Hamel (1869-1917) composée à l'origine pour la flûte, ici lors d'un thé dansant en 2004 dans le Doubs 

 

Yvette Horner (1922-2018) reine de musette au Tour de France 1952 

 

Terminons ce parcours avec une ritournelle bien parisienne évoquant la bonne odeur de café-croissant matinal sur le zinc, toujours avec Yvette... 

 

Bonne fête de la musique à toutes et tous !